1 Amateurs d’art égyptien, il vous arrive de discuter inlassablement de la datation d’une œuvre. Faut-il vous en blâmer ? Au contraire. Il est vrai que certaines discussions entre experts sur un point de détail stylistique peuvent paraître anecdotiques, mais ce qu’on appelle en anglais « connoisseurship1 », mot trop souvent prononcé avec parfois une légère moue de dédain et qui n’a pas d’équivalent exact en français (bien que le mot « connoisseur » soit un emprunt au vieux français), est en réalité un outil précieux pour l’étude du passé. On désigne aujourd’hui sous le terme de « connoisseurship » la connaissance précise 2 des arts, du style, des techniques, due à une longue pratique qui conduit à une véritable expertise. Il s’agit d’une compétence indispensable non seulement à qui travaille dans le marché de l’art, pour attester de l’authenticité d’une pièce, la dater, l’attribuer à un artiste ou un atelier et identifier la personne ou le motif représentés, mais aussi au chercheur qui étudie des objets dont la provenance n’est pas connue. Un « connoisseur » doit avoir à la fois un « œil », de l’intuition et de l’expérience – l’œil et l’intuition ne suffisant pas.

Loin d’être une question de détail, la datation précise d’une pièce par son style peut renouveler la vision du contexte dont l’objet est issu, apporter une meilleure compréhension de la chronologie, des usages, des pratiques cultuelles ou sociétales au cours des différentes phases de l’histoire que le monument a traversées. S’égarer, en revanche, dans la datation, l’identification ou l’interprétation d’une statue, d’un relief, d’une peinture ou de toute autre œuvre peut avoir un impact sur notre perception de l’occupation du site et en fausser la reconstitution.

Le cas de Qaou el-Kebir est représentatif à cet égard2. Les fragments de statues et de reliefs qui en proviennent, dont la plupart sont aujourd’hui au Museo Egizio de Turin, ont fait l’objet de diverses datations, ce qui a longtemps conduit à penser que les trois grands hypogées qui dominent sa nécropole datent de la fin de la XIIe dynastie, jusqu’au règne d’Amenemhat III, c’est-à-dire d’une période où l’on ne trouve plus aucune trace de tels monuments ailleurs en Égypte. Ce site aurait donc constitué, en quelque sorte, une anomalie. La datation de certains de ces fragments doit cependant être corrigée ; le contexte archéologique est également à préciser, car plusieurs statues mises au jour sur le site datent en effet de la fin du Moyen Empire, mais ont été déposées à une époque postérieure à la construction des grandes tombes. Elles ne contredisent donc pas la reconstitution historique permise par l’étude des autres nécropoles de Moyenne Égypte. Ainsi que d’autres chercheurs l’ont proposé précédemment, il apparaît désormais évident que les trois grands complexes funéraires de Qaou el-Kebir datent bien de la première moitié et du milieu de la XIIe dynastie ; l’étude stylistique des fragments statuaires représentant leurs propriétaires suggère même qu’ils ne sont pas postérieurs au règne de Sésostris II.

Les trois gouverneurs en question sont en revanche devenus des sortes de « saints » ou de divinités locales au cours de la deuxième moitié du Moyen Empire et leurs tombes, entretenues comme des sanctuaires, ont continué d’être visitées. Au cours des décennies qui ont suivi la disparition de Ouahka II, les dignitaires locaux semblent avoir continué de se faire enterrer dans des puits creusés dans les cours des trois complexes, ainsi qu’à orner ces lieux de culte de nouvelles statues.

1. L’architecture funéraire au service des nomarques au Moyen Empire

L’étendue et la nature exacte du pouvoir des chefs de province au cours du Moyen Empire ne sont pas des plus faciles à évaluer, car les sources dont nous disposons sont très inégales et proviennent surtout de Moyenne Égypte3. Les cas documentés montrent le nomarque comme un personnage central dans sa province, délégué du souverain et administrant son nome comme le roi gouverne le pays, et directement sous la tutelle de celui-ci.

Durant l’Ancien Empire et la première moitié du Moyen Empire, la charge de nomarque4, représentant du roi, semble être héréditaire et de véritables dynasties locales se maintiennent à la tête des mêmes provinces pendant plusieurs générations, voire plusieurs siècles. Les imposantes tombes rupestres richement ornées des montagnes de Qubbet el-Hawa, Meir, Beni Hassan et el-Bersha témoignent encore aujourd’hui des moyens à disposition des nomarques de ces régions dans la première moitié de la XIIe dynastie. Ailleurs en Égypte, cependant, l’absence de tels monuments nous prive d’informations sur les fonctions et le degré d’importance des nomarques.

Les hypogées qui nous sont parvenus suivent généralement un plan assez similaire, avec une façade taillée dans la falaise, parfois dotée d’un portique menant à la chapelle proprement dite, constituée d’une pièce rectangulaire pouvant être précédée d’une antichambre. Dans l’axe de l’entrée, une niche ou même une chambre sont souvent creusées dans le mur du fond pour accueillir la statue du propriétaire du tombeau, point de mire de toute personne pénétrant dans la chapelle (Fig. 1). Les murs d’une chapelle peuvent comporter plusieurs niches, probablement pour abriter diverses statues du propriétaire de la tombe, qui peut être représenté avec sa famille par un groupe statuaire, comme dans le cas du gouverneur Oukhhotep IV à Meir. La chapelle funéraire de ce dernier comprend quatre niches creusées dans la roche5 : une grande dans l’axe de l’entrée, vraisemblablement destinée à une statue grandeur nature aujourd’hui perdue, et trois petites sur les côtés, qui accueillaient des sculptures de dimensions plus modestes, dont deux nous sont probablement parvenues, des groupes statuaires représentant le gouverneur accompagné de deux de ses épouses et de sa fille (Boston 1973.87 et Le Caire CG 459)6. Sur les murs peints de la chapelle, Oukhhotep montre fièrement qu’il a été marié à plusieurs femmes. On ignore si toutes ces femmes sont mortes jeunes et si elles ont été épousées successivement ou s’il s’agit 3 plutôt d’un cas de polygamie – ce qui ne serait pas sans lui donner des apparences quelque peu royales, car la polygamie n’est guère documentée pour les particuliers au Moyen Empire.

Fig. 1

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Plan et section de la chapelle funéraire du gouverneur Oukhotep IV, Meir (C 1). Dessin de l’auteur, d’après Blackman et Apted, The Rock Tombs of Meir VI, 1953, pl. 4.

Tout, dans l’architecture monumentale de ces chapelles comme dans l’iconographie de leur programme décoratif, est employé pour présenter le nomarque comme un personnage prédominant. Comme dans le décor funéraire des tombes privées de l’Ancien Empire, le roi est absent des scènes ; le rôle central est joué par le nomarque, qui, en tant que son représentant, est montré agissant presque comme un substitut du souverain dans sa province. Sur les murs richement peints ou parfois même sculptés, le nomarque est magnifié, représenté de grande taille, portant parfois même des attributs royaux, recevant des offrandes, dirigeant des travaux ou jouant le rôle central dans les scènes traditionnelles de pêche et de chasse dans les marais7.

La chapelle funéraire de Djehoutyhotep II à el-Bersha est particulièrement représentative de cette amplification de la centralité de la figure du dirigeant provincial. Sur le mur occidental, une scène souvent reproduite dans les livres d’art égyptien représente le transport d’une statue colossale à l’effigie du gouverneur depuis la carrière de Hatnoub jusqu’à la vallée du Nil (Fig. 2). Les textes accompagnant la scène nous apprennent que Djehoutyhotep a exploité les carrières de Hatnoub au nom du roi Sésostris III, opération qui lui aurait permis de s’attirer les faveurs du souverain. Ces mêmes textes décrivent la statue comme un colosse en calcite-albâtre de 13 coudées de haut, soit près de 7 mètres. Les textes précisent à plusieurs reprises qu’il s’agit d’une récompense royale et décrivent la joie ressentie par les habitants du nome lors du spectacle de l’arrivée de la statue de Djehoutyhotep8. Ainsi que l’ont souligné Luc Delvaux et Gabriele Pieke, cette scène constitue probablement l’un de ces cas où il convient de garder une distance raisonnable avec la scène comme avec le texte qui l’accompagne, qui nécessitent tous deux une interprétation plutôt qu’une lecture littérale9. En effet, si l’événement glorifié du transport et de l’installation d’une statue du gouverneur a dû avoir lieu, et s’il est vraisemblable également que cette statue ait été de grand format, puisque la scène, inhabituelle, insiste sur l’exceptionnalité de sa taille, 4-5 il est en revanche plus difficile à accepter que cette statue d’albâtre ait atteint les 7 mètres mentionnés. Aucune autre statue dans ce matériau, même royale, de telles dimensions n’est connue avant le Nouvel Empire, et un privilège aussi extraordinaire pour un gouverneur de province, même favorisé par le roi, semble peu concevable. Aucune statue de Sésostris III n’atteint même la moitié de ce format, et seuls les deux colosses d’Amenemhat III à Biahmou, à la génération suivante, auraient dépassé ces dimensions. La comparaison avec le répertoire statuaire connu du Moyen Empire montre que même une statue grandeur nature du dignitaire constituerait déjà une œuvre remarquable, et une marque de faveur exceptionnelle s’il s’agit d’un don de la part du roi. Le matériau lui-même est exceptionnel, car l’albâtre est rarement employé en sculpture, notamment en raison de sa fragilité10. L’hommage rendu par le souverain offrant une grande statue en albâtre doit avoir été suffisamment extraordinaire pour être souligné sur les murs du monument funéraire du gouverneur, afin de proclamer le prestige de ce dernier. Les détails nombreux et précis fournis par l’iconographie et le texte accompagnant la scène donnent une apparence de vraisemblance à l’ensemble de la scène. N’accusons pas, bien évidemment, le nomarque, de malhonnêteté. Il ne s’agit nullement d’un mensonge, mais plutôt de l’expression emphatique de l’enthousiasme causé par ce don royal exceptionnel, transformant en véritable colosse une statue déjà exceptionnelle, réalisée dans un matériau inhabituel et prestigieux. Puisque la véritable statue se trouvait, à l’époque de Djehoutyhotep, à proximité plus ou moins directe de cette scène, il était évident que l’intention de la scène et du texte qui l’accompagnait n’était pas de tromper le visiteur de la chapelle funéraire – qui aurait été dupe ? Face à une statue de grand format (probablement grandeur nature) en albâtre, le propriétaire, tout comme le visiteur, pouvait s’exclamer : « que cette statue est extraordinaire, elle l’est autant qu’une statue qui mesurerait 7 mètres de haut ! »

Transport de la statue du gouverneur Djehoutyhotep, peinte sur le mur nord de la chapelle funéraire. D’après Newberry, El Bersheh I, 1894, pl. 15.

D’après ce qu’on peut tirer de l’étude de ces nécropoles provinciales, au moins en Haute et Moyenne Égypte, les nomarques de la première moitié de la XIIe dynastie avaient donc la possibilité (c’est-à-dire à la fois la permission et les moyens matériels) de réaliser des chapelles funéraires monumentales, richement décorées de peintures, de reliefs et de statues, qui les présentaient comme des princes à part entière, des représentants, presque des petits « clones » du roi dans les provinces. Il ne faut pas nécessairement y voir une forme d’usurpation du pouvoir royal, mais plutôt un dédoublement de la personne du roi, au sein des provinces (du moins, d’après les sources à notre disposition dans les provinces documentées).

Cette situation semble changer à l’époque de Sésostris III, à la charnière entre la première moitié du Moyen Empire et le « Moyen Empire tardif ». 6 Le rôle et l’importance des princes-gouverneurs provinciaux ont peut-être alors connu un bouleversement – à moins que cette impression ne soit surtout fondée sur la nature des sources à notre disposition. Ilin-Tomich a montré qu’il faut probablement se méfier de l’apparente évolution des titres des dignitaires. Plutôt qu’un changement structurel et un déclin dans le pouvoir des familles provinciales, peut-être faut-il plutôt voir une modification de la manière d’exprimer son pouvoir, ainsi que dans les pratiques funéraires. La disparition des grands hypogées est pour beaucoup dans cette image11. L’évolution même de la nature des sources est notable. L’aristocratie constituée par la noblesse régionale et territoriale est moins documentée, tandis que les centaines de stèles qui nous sont parvenues mentionnent une sorte de « noblesse de robe » (si on se permet l’anachronisme d’employer ce terme emprunté au XVIIe siècle), composée de hauts fonctionnaires attachés à l’administration centrale12. Ces dignitaires, tout comme les héritiers des grandes familles de gouverneurs provinciaux, ne se font plus bâtir ou creuser d’immenses complexes funéraires13.

2. Le cas de Qaou el-Kebir est-il une exception ?

Un site a longtemps semblé contredire ce tableau d’un changement des pratiques sous Sésostris III et de la disparition des grands hypogées : Qaou el-Kebir, à quelque 150 km au sud d’el-Bersha, 100 km au sud de Beni Hassan et de Meir. La nécropole de Qaou el-Kebir comporte plusieurs tombes des XIIe et XIIIe dynasties, dominées par trois complexes funéraires monumentaux – les plus grands monuments non royaux connus du Moyen Empire, composés d’une série de portiques, cours, portails et chaussées montantes en briques crues menant aux hypogées taillés dans la falaise de la rive orientale du Nil (Figs. 3-5). Malgré la dégradation du site, les trois tombes ont livré un riche matériel, principalement composé de centaines de fragments de bas-reliefs et de statues, beaucoup d’entre eux conservés au Museo Egizio de Turin14 et au Petrie Museum de Londres. Les fragments inscrits ont permis aux archéologues d’identifier les propriétaires (principaux) des trois grands complexes : Ouahka (Ier), fils de Nakhti (tombe n° 7), 7 Ibou, fils d’Hetepouy (tombe n° 8) et un autre Ouahka (II), fils d’Hetepouy (tombe n° 18). Cette dernière tombe, la plus vaste, s’étend sur plus de 225 mètres de longueur.

L’ordre de succession de ces trois dignitaires et donc de la construction des trois complexes funéraires a été à plusieurs reprises l’objet de discussions15. La reconstitution de leur généalogie est rendue complexe par l’emploi récurrent des mêmes noms au sein de la famille, sur plusieurs générations16. Aucun nom royal n’a été retrouvé parmi les fragments inscrits mis au jour17.

Plan de la nécropole de Qaou el-Kebir. D’après Steckeweh et Steindorff, Die Fürstengräber von Qâw, 1936, pl. 7.

Fig. 4

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Terrasses de la chapelle funéraire de Ouahka II. Photographie tirée des archives d’E. Schiaparelli / Museo Egizio.

Fig. 5

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Reconstitution de la nécropole de Qaou el-Kebir. Dessin : auteur, d’après la reconstitution 3D disponible sur le site de l’University College, London (www.ucl.ac.uk/museums-static/digitalegypt/3d/pictures/qau3.jpg).

Les trois monuments ont longtemps été datés de la fin de la XIIe dynastie par les chercheurs, principalement à cause de deux objets :

– Une statue assise de grand format d’un gouverneur nommé Ouahka, fils de Néferhotep, trouvée dans un puits funéraire de la tombe n° 7 (Turin S. 4265). Des critères stylistiques (qui méritent d’être reconsidérés) ont conduit à la dater du règne de Sésostris III.

– Une stèle sans provenance, représentant un gouverneur nommé Ouahka, fils de Nakht, dans l’acte de vénération du cartouche du roi Amenemhat III (Fig. 7 ; Stockholm NME 15/MM 3200418). On a voulu y voir le propriétaire de la tombe n° 7.

Cependant, aucune de ces deux pièces ne représente un des commanditaires des trois complexes monumentaux de Qaou el-Kebir. Elles leur sont postérieures de plusieurs générations. Ces trois immenses édifices cultuels, d’apparence quasi royale, répondent davantage aux critères que l’on retrouve dans la première moitié de la XIIe dynastie, et, par leur typologie même, il est très improbable qu’il faille les dater des règnes postérieurs à celui de Sésostris II. Le style des statues des trois propriétaires des tombes confirme ce terminus ante quem.

Les premières fouilles du site de Qaou el-Kebir furent dirigées en 1905-1906 par Ernesto Schiaparelli, alors directeur du Museo Egizio de Turin, et par son assistant Francesco Ballerini. Le produit de ces fouilles entra dans les collections piémontaises.

En 1912-1914, l’équipe d’Ernst von Sieglin mena de nouvelles expéditions, publiées en 1936 par Georg Steindorff et Hans Steckeweh). Le matériel mis au jour fut principalement envoyé à Leipzig ; la Deuxième Guerre Mondiale en fit disparaître une partie.

Les dernières campagnes de fouille se tinrent en 1923-1924 et furent publiées en 1930 par Petrie. Plusieurs des fragments mis au jour gagnèrent le Royaume-Uni.

Le contexte de découverte des nombreux fragments de statues et de reliefs a été hélas peu documenté, ce qui a entraîné de nombreuses confusions dans l’attribution des pièces à un monument ou à un autre, mais les travaux d’Elisa Fiore Marochetti basés sur le matériel turinois ont permis de remettre de l’ordre dans le dossier et dans sa chronologie et de réattribuer à chacune des trois tombes une grande partie des 2400 fragments conservés au Museo Egizio19.

2.1. La tombe de Ouahka (Ier), fils de Nakht(i) (tombe n° 7)

La plus septentrionale des trois tombes (qui est aussi la plus modeste en taille) est celle d’un certain Ouahka, fils de Nakht20. À cause de l’existence de la stèle de Stockholm (Fig. 7), sur laquelle un dignitaire répondant à ce nom est représenté dans l’acte d’adoration face au cartouche d’Amenemhat III, il a été considéré que cette tombe devait dater du règne de ce dernier. Cependant, le nom de Ouahka est porté par de nombreux individus à Qaou el-Kebir21 ; quant au nom de sa mère, Nakht, il est l’un des plus couramment utilisés au Moyen Empire, pour chacun des deux sexes22. Étant donné la pratique fréquente de donner le même nom à plusieurs membres d’une même famille (parfois même pour des frères et sœurs), il n’est pas improbable que l’on puisse retrouver de parfaits homonymes à différentes générations. C’est probablement le cas ici, car le matériel découvert dans cette tombe n° 7 ne date pas de la fin mais bien du début de la XIIe dynastie. Les fragments de visage en calcaire (Turin S. 4252 et 4253, Fig. 6) et de la statue assise encore in situ (étonnamment placée derrière la rampe taillée dans la roche, qui mène de la terrasse inférieure à la supérieure), très abîmés, ne fournissent pas de critères de datation très précis23. Cependant, la niche principale taillée dans la roche dans l’axe de l’entrée abritait un fragment de trône en granodiorite, fragment d’une statue grandeur nature, 8-9 probablement l’objet principal du culte qui se déroulait dans la chapelle (Petrie Museum, Londres UC 14498)24. Il s’agit du côté gauche d’un siège sans dossier, orné de grands signes hiéroglyphiques qui présentent le nom et les titres du personnage représenté, Ouahka, organisés en larges colonnes séparées par d’épaisses lignes verticales, une disposition caractéristique de la première moitié de la XIIe dynastie25. La stèle de Stockholm NME 15/MM 32004 (Fig. 7) appartient clairement à une période bien plus tardive, peut-être même à la XIIIe dynastie, au cours de laquelle le culte d’Amenemhat III semble se développer26. S’il est difficile de la dater précisément, il est du moins probable qu’au moins un siècle sépare la stèle de la tombe n° 7 et que l’on ait bien affaire à deux individus distincts désignés sous le nom et matronyme de « Ouahka, fils de Nakht », peut-être tous deux appartenant à la même lignée.

Fig. 6

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Fragment d’une des statues trouvées dans la tombe de Ouahka Ier (Turin S. 4253). Photo : auteur.

Stèle d’un certain Ouahka, fils de Nakht, de la fin de la XIIe ou du début de la XIIIe dynastie (Stockholm NME 15/MM 32004). Photo : auteur.

2.2. La tombe d’Ibou, fils de Hetepouy (tombe n° 8)

La tombe d’Ibou, construite au sud de celle de Ouahka, fils de Nakht, lui ressemble beaucoup, tant par son architecture que par ses dimensions. Elle contenait un large sarcophage en calcaire (Turin S. 4264/1) portant le nom et la titulature du nomarque, dont la forme et la décoration en « façade de palais » rappellent les cercueils en bois du milieu de la XIIe dynastie27. L’analyse des archives de Schiaparelli réalisée par Elisa Fiore Marochetti a permis d’attribuer à ce monument bon nombre de fragments de statues, de reliefs et d’éléments architecturaux en calcaire28.

D’après leur style, les têtes des statues (Turin S. 4410-4414, Figs. 8-10) sont à dater des environs du règne d’Amenemhat II29: on y reconnaît le visage carré, les joues pleines, la bouche large aux formes simplifiées, les lèvres au contour géométrisé, les yeux grands ouverts et les sourcils représentés par un épais trait de fard30. Une caractéristique du règne d’Amenemhat II est précisément cette combinaison de monumentalité et de soin particulier pour le rendu des détails (stries des perruques pour un particulier, rayures du némès pour une statue royale ou poils de la crinière pour un sphinx, perles des parures, plis et ornements des vêtements…)31.

Tête d’une statue d’Ibou, reconstituée à partir de plusieurs fragments (Turin S. 4410). Photo : Pino Dell’Aquila / Museo Egizio.

Visages des statues d’Ibou (Turin S. 4411-4414). Photos : Pino et Nicola Dell’Aquila / Museo Egizio.

Partie latérale d’une des statues d’Ibou (Turin S. 4427). Photo : Museo Egizio.

Les visages des statues trouvées en fragments dans la tombe d’Ibou présentent un trou percé sous 10-11 le menton, afin de permettre aux sculpteurs de fixer une barbe grâce à un tenon32. Plusieurs de ces barbes sculptées comme des éléments rapportés en calcaire et finement détaillées, découvertes sur le site et aujourd’hui dans les collections turinoises, étaient probablement attachées à ces mentons (Fig. 11). Ces courtes barbes carrées sont également caractéristiques de la mode des hauts dignitaires au milieu de la XIIe dynastie33.

Malgré leur état très fragmentaire, il est possible de reconstituer l’aspect de ces statues de grand format à l’effigie du nomarque : il est représenté assis, adossé à un large panneau dorsal et enveloppé dans un manteau, coiffé d’une perruque ondulée qui lui arrive aux épaules, les mains portées à la poitrine (Fig. 12). La minutie du rendu de la frange du manteau, des perles tubulaires composant les colliers, des striations et des ondulations de la perruque, l’aspect massif des proportions du corps, ainsi que la similarité des traits du visage avec les portraits du roi Amenemhat II permettent de penser que ces statues aient été réalisées soit par des sculpteurs formés dans les ateliers royaux, soit par des artistes « prêtés » ou envoyés par le roi lui-même34.

L’emplacement original de ces statues au sein de la tombe n’est pas connu. Cependant, comme l’a proposé Fiore Marochetti, en raison de leur nombre (au moins quatre, peut-être six), nous pouvons suggérer qu’elles aient été placées dans les portiques, semblables à celles de la tombe de Ouadj, à Kôm Khelua, dans le Fayoum, datée de la première moitié de la 12 XIIe dynastie35.

Barbe d’une des statues d’Ibou ou Ouahka II (Turin P. 2059). Photo : auteur.

Reconstitution de l’apparence d’une des statues assises d’Ibou (Turin S. 4410). Dessin : auteur.

Parmi les fragments trouvés lors des fouilles de Schiaparelli, on peut reconstituer une seconde série de statues en calcaire, de forme similaire mais dotées de perruques et d’ornements plus élaborés (Figs. 13-15)36. Il semble s’agir de sortes de répliques, plus raffinées encore, de la série de statues précédente. La perruque se termine non plus par une simple ligne horizontale au-dessus des épaules, mais par plusieurs rangs serrés de mèches tubulaires frisées. Les colliers diffèrent aussi légèrement : ils sont composés de perles plus épaisses et leur rang inférieur de perles en forme de gouttelettes. On ignore hélas la provenance précise de cette seconde série de statues assises, datable également du milieu de la XIIe dynastie d’après son style. D’après les documents à notre disposition, les fragments proviendraient soit de la tombe d’Ibou, soit de celle de Ouahka II. Il en est de même pour les morceaux de statues debout, légèrement plus petites que nature, qui représentent le nomarque enveloppé dans un manteau et portant une perruque tripartite (Figs. 16-18)37.

Fragment de perruque élaborée d’une statue d’Ibou ou Ouahka II (Turin P. 2422+2433). Photo : auteur.

Fragment de perruque élaborée d’une statue d’Ibou ou Ouahka II (Turin P. 2600). Photo : auteur.

Épaule et fragment de perruque d’une statue d’Ibou ou Ouahka II (Turin P. 2408). Photo : auteur.

Fragment de poitrine et de col d’une statue d’Ibou ou Ouahka II (Turin P. 2390 + 2355 + 2083). Photo : auteur.

Fragment de perruque tripartite, provenant d’une statue debout d’Ibou ou Ouahka II (Turin P. 5552). Photo : auteur.

2.2. La tombe de Ouahka (II), fils d’Hétépouy (tombe n° 18)

Le troisième monument funéraire, plus au sud, est considérablement plus large. Une longue chaussée montante formant un angle conduit du portail ou « temple bas » à la chapelle funéraire, composée de plusieurs terrasses, d’un péristyle et d’un portique menant à l’hypogée38. Les fragments inscrits trouvés parmi les ruines de la chapelle permettent de l’attribuer à un autre Ouahka, fils d’Hétépouy. Le matronyme, identique à celui d’Ibou, suggère que nous ayons affaire à deux frères – bien qu’on ne puisse exclure un autre cas d’homonymie au sein de la famille. L’architecture de la superstructure du tombeau consiste en une monumentale succession de terrasses, cours et portiques, en partie taillée dans la roche de la falaise et en partie édifiée en briques crues, tandis que la chapelle proprement dite est entièrement taillée dans la montagne. Les plafonds étaient peints et les murs au moins partiellement couverts de bas-reliefs peints. L’iconographie des fragments retrouvés reproduit le répertoire des grandes chapelles funéraires du milieu de la XIIe dynastie découvertes sur d’autres sites de Moyenne Égypte : scènes d’offrande, cortèges de porteurs, scènes de course ou de danse, ainsi que des fragments qui semblent provenir d’une scène de chasse et pêche39.

Les fragments d’une statue colossale en granodiorite 13-15 ont été découverts dans la niche centrale de la chambre principale de la chapelle-hypogée40. Les dimensions de ce colosse peuvent être estimées à près de quatre mètres de haut, ce qui en fait la plus grande statue privée qui nous soit connue du Moyen Empire (à l’exception du « colosse » d’albâtre de Djehoutyhotep mentionné plus haut, qui, si la scène et l’inscription qui l’accompagne doivent être lues littéralement, aurait tout de même été près de deux fois plus grand que la statue de Ouahka II). Le fragment d’épaule S. 4269/04 (Fig. 19) conserve la terminaison gauche du collier, en forme de tête de faucon, élément qui nous rapproche de l’iconographie royale41. Pourtant, il s’agit bien d’une statue de dignitaire et non de souverain, ainsi qu’en attestent les quelques fragments de la statue qui révèlent la présence d’une perruque.

Fig. 18

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Reconstitution de l’apparence d’une des statues debout d’Ibou ou Ouahka II (Turin S. 4421/1 + 4415 + 4416 + P. 2399). Dessin : auteur, d’après Fiore Marochetti, dans Hudáková et al., Change and Innovation, 2016, pl. 12, fig. 21.

Épaule du colosse de la niche centrale de la chapelle funéraire de Ouahka II (Turin S. 4269.04). Photo : Museo Egizio.

Plusieurs autres fragments de statues grandeur nature en granodiorite ont été retrouvés dans la tombe, dont une barbe cérémonielle exceptionnellement longue (Turin S. 4270, Fig. 20) et la partie médiane d’une statue debout montrant le dignitaire vêtu d’un pagne plissé de type shendjyt (S. 426742, Fig. 21). 16-17 Comme le collier gorgerin au faucon, la barbe longue et le pagne shendjyt sont deux attributs généralement caractéristiques de l’iconographie royale – cependant, le titre de gouverneur (ḥꜣty-ꜥ ꞽmy-r ḥmw-nṯr) et le nom de Ouahka inscrits sur la ceinture ne laissent pas de doute sur la nature non royale de l’individu.

Plusieurs fragments de têtes en granodiorite43 et en calcaire44, trouvés dans la tombe de Ouahka II présentent le style caractéristique du milieu de la XIIe dynastie, autour des règnes d’Amenemhat II et Sésostris II45 (Figs. 22-26), c’est-à-dire précisément de l’époque dont datent les monuments les plus vastes et les plus richement décorés dans les autres provinces, à Beni Hassan, Meir, el-Bersha et Éléphantine.

Barbe d’une statue en granodiorite trouvée dans la chapelle funéraire de Ouahka II (Turin S. 4270.10). Photo : auteur.

Pagne shendjyt d’une statue d’un gouverneur du nom de Ouahka, trouvée dans la chapelle funéraire de Ouahka II (Turin S. 4267). Photo : auteur.

Tête d’une statue en granodiorite provenant de la chapelle funéraire de Ouahka II (Turin P. 3604). Photo : auteur.

Tête de statue en granodiorite de la chapelle funéraire de Ouahka II (Turin S. 4269). Photos : auteur.

Épaule d’une statue en granodiorite trouvée dans la chapelle funéraire de Ouahka II (Turin S. 4270/11). Photo : auteur.

Reconstitution de la tête d’une statue en calcaire de Ouahka II (Turin P. 2058+2061+2066). Photos : auteur.

Torse d’une statue en calcaire trouvée dans la chapelle funéraire de Ouahka II (Turin S. 4268). Photo : auteur.

Les tombeaux d’Ibou et de Ouahka II présentent ainsi toutes les caractéristiques des monuments funéraires des règnes du milieu de la XIIe dynastie, autrement dit de l’« âge d’or » de l’expression du pouvoir des nomarques dans les provinces.

Qaou el-Kebir ne constitue donc pas une singularité, mais renforce au contraire le modèle livré par les autres nécropoles provinciales du Moyen Empire. Les trois complexes monumentaux et richement décorés montrent les nomarques dans toute leur majesté, empruntant au roi, dont ils sont les représentants locaux, des éléments de son apparence. C’est ainsi qu’ils se font représenter par des statues de grand format dotées d’amples perruques, montrant clairement qu’il s’agit de personnes privées, mais portant soit un pagne de type shendjyt, soit un long manteau pour des statues dont l’allure et la posture pleine de dignité ne sont pas sans rappeler les représentations jubilaires du souverain.

3. Trois nomarques, leurs descendants et le culte des ancêtres

Si les trois tombes monumentales datent selon toute vraisemblance du milieu plutôt que de la fin de la XIIe 18-19 dynastie, elles ont aussi livré un grand nombre de fragments de statues qui appartiennent bien, quant à elles, à des dignitaires plus tardifs. Leur présence dans le même contexte archéologique a conduit à quelque confusion et a influencé la datation erronée de la construction des trois complexes.

Le fragment de tête de Turin S. 4450 (Fig. 27), par exemple, appartenait à une statue en calcaire qui imitait clairement les représentations d’Ibou et de Ouahka II, avec une ample perruque ondulée et élaborée, mais la qualité en est beaucoup plus pauvre et ne répond guère au haut degré de raffinement des statues précédentes.

Fragment de statue en calcaire trouvé dans la chapelle funéraire de Ouahka II, probablement fin XIIe dynastie (Turin S. 4450). Photo : auteur.

La statue grandeur nature en calcaire du député (ꞽdnw) Nakhti (Le Caire TR 23/3/25/346) est un autre exemple, plus manifeste encore, de ces représentations plus tardives de dignitaires locaux, qui cherchaient à imiter les statues de leurs prestigieux prédécesseurs, mais n’avaient clairement plus accès aux sculpteurs des ateliers royaux. La qualité de la statue du député Nakhti est bien inférieure à celle que l’on observe chez Ouahka Ier, Ibou et Ouahka II. Les bourrelets de graisse maladroitement stylisés sur le ventre et la forme de la perruque, typique de la fin du Moyen Empire, désignent une production distincte (Fig. 28). Pourtant, le format en est clairement inspiré : on observe même le trône sans dossier, rare au Moyen Empire tardif, mais que l’on retrouve sur toutes les grandes figures assises de Qaou el-Kebir, probablement parce qu’elles suivent toutes le modèle des statues de Ouahka Ier, Ibou et Ouahka II. La statue de Nakhti semble ainsi être une sorte de reproduction de qualité moyenne des statues des trois grands dignitaires du passé, réalisée selon le style de son époque.

Statue en calcaire du député Nakhti trouvée à Qaou el-Kebir (Le Caire TR 23/3/25/3). Photos : auteur.

Parmi les statues trouvées dans la tombe de Ouahka II et appartenant à d’autres personnages, on relève aussi la figure assise d’un trésorier (ꞽmy-r ḫtmt) portant le nom de Ouahka, fils de Mouty (Turin S. 428147, Fig. 29) et celle du « suivant » (šmsw) Ouahka-herib (S. 428048, Fig. 30). Il est possible que ces individus aient été enterrés dans le même complexe funéraire, puisque plusieurs puits y ont été creusés49. Certains de ces puits ont peut-être été prévus dès le début et avoir été taillés pour des personnes de l’entourage de Ouahka II, mais il se peut que plusieurs aient été ajoutés au cours du temps, pour des enterrements successifs au sein du monument funéraire principal de la famille du nomarque.

Statue du trésorier Ouahka, fils de Mouty, dédiée au gouverneur Ibou divinisé (Turin S. 4281). Granodiorite. Photos : auteur.

Statue du gardien Ouahka-herib, fils de Tjetjetet, dédiée au gouverneur Ouahka II (Turin S. 4280). Photos : auteur.

C’est peut-être pour accompagner une de ces inhumations tardives que la statue S. 4265 (Fig. 31) a été installée dans le complexe de Ouahka Ier (tombe n° 7). Elle a été retrouvée brisée en deux dans un des puits funéraires. Il s’agit d’une statue assise de grand format pour un particulier (un peu plus grande que nature), sculptée dans une variété de calcaire induré, inscrite au nom d’un gouverneur Ouahka, fils de Néferhotep50. Le calcaire jaune aux reflets gras dans lequel elle a été sculptée est le même que celui de la statue de Nakhti (Le Caire TR 23/3/25/3) et de la tête de Turin S. 4450 mentionné ci-dessus ; il diffère, en revanche, du beau calcaire blanc employé pour les statues de Ouahka Ier, Ibou et Ouahka II. Cette statue a contribué à la confusion au sujet de la datation des hypogées, en raison de son style qui appartient clairement à la fin du Moyen Empire. Ingrid Melandri l’a datée du règne de Sésostris III en raison de son visage à l’expression sévère51. En réalité, il faut la dater de bien plus tard encore. L’apparence austère du visage est principalement due aux coups qui y ont été portés, mais il ne porte en fait aucune des marques caractéristiques que l’on retrouve sur les portraits de Sésostris III. Un examen rapproché du visage révèle les commissures des lèvres, relevées pour former le « sourire » propre aux statues de la XIIIe dynastie, datation confirmée par la forme des yeux en amande et la coiffure lisse (alors qu’elle est invariablement striée dans la deuxième moitié de la XIIe dynastie)52 (Fig. 31d).

Statue du gouverneur Ouahka (III ?), fils de Neferhotep (Turin S. 4265). Photos : Pino et Nicola Dell’Aquila / Museo Egizio. Dessins : auteur.

Ainsi que l’ont proposé J. Siesse et A. Ilin-Tomich, il est probable que ce Ouahka, fils de Néferhotep, soit aussi le propriétaire de la stèle de Turin Cat. 1547 (Fig. 32), datée de la fin de la XIIe ou du début de la XIIIe dynastie sur la base de critères iconographiques et épigraphiques53. Le gouverneur représenté par la statue de Turin S. 4265 serait donc un lointain successeur, peut-être un descendant, du premier propriétaire du complexe funéraire dans lequel elle a été trouvée.

Malgré les dommages qu’elle a subis, il est manifeste que la statue était d’une meilleure qualité d’exécution que la statue du député Nakhti (Le Caire TR 23/3/25/3, Fig. 28). La similitude avec les statues royales du début de la XIIIe dynastie permet de suggérer que, comme on l’a observé pour les statues d’Ibou et de Ouahka II, ce gouverneur de Qaou 20 el-Kebir ait eu accès à un ou plusieurs sculpteurs qui dépendaient des ateliers royaux ou y avaient au moins été formés. Les dimensions de la statue sont exceptionnellement grandes pour un individu non royal de cette fin du Moyen Empire54. En outre, la barbe (aujourd’hui détruite) frappe par sa longueur inhabituelle et donne l’impression que, comme ses prédécesseurs, Ouahka (III ?55) fils de Néferhotep ait voulu apparaître en majesté quasi royale, par le biais d’une statue assise installée dans le complexe funéraire, lui-même quasi royal, de son ancêtre.

Près d’un siècle sépare le nomarque Ouahka Ier de ce gouverneur Ouahka (III ?). Cette statue a-t-elle été installée dans le tombeau-sanctuaire en hommage à son ancêtre « sanctifié », selon une coutume largement attestée au Moyen Empire, ou le nouveau gouverneur s’est-il également réapproprié le complexe en y ajoutant sa propre sépulture ? Un fragment de cercueil en bois anthropoïde trouvé dans un des puits funéraires du complexe funéraire (Turin S. 4309, Fig. 33), sur lequel on reconnaît les traits caractéristiques de la fin du Moyen Empire, plaide en faveur de cette hypothèse.

Stèle du gouverneur Ouahka (III ?), fils de Neferhotep (Turin C. 1547). Photo : Museo Egizio.

Fragment de cercueil en bois trouvé dans un puits du complexe funéraire de Ouahka II (Turin S. 4309). Photo : auteur.

Ainsi que l’a observé E. Ciampini, le culte rendu aux gouverneurs défunts semble avoir constitué une part importante des activités religieuses à Qaou el-Kebir, comme dans d’autres régions d’Égypte au cours du Moyen Empire56. En témoigne une table d’offrande placée dans le complexe funéraire de Ouahka II par un de ses successeurs, un gouverneur du nom de Nemtynakht57. La pratique d’installer des stèles et des statues dans les monuments dédiés à d’anciens souverains ou dignitaires de l’Ancien ou du début du Moyen Empire est une caractéristique des pratiques cultuelles du Moyen Empire. Elle se manifeste dans la nécropole memphite (dans les temples funéraires royaux des Ve et VIe dynasties), à Abydos (dans le « Middle Cemetery »), à Thèbes (dans le temple funéraire de Montouhotep II), à Edfou (dans le mastaba d’Isi) ou encore à Éléphantine (dans le sanctuaire d’Héqaib, autour duquel des chapelles-naoi ont été construites pour plusieurs dignitaires jusqu’à la fin de la XIIIe dynastie). Ces différents sites ont livré de nombreux monuments privés 21 de taille et de qualité variables datant des XIIe et XIIIe dynasties, portant parfois des inscriptions dédiées à l’ancien dignitaire en quelque sorte déifié. À Qaou el-Kebir, la statuette du trésorier Ouahka, fils de Mouty (Turin S. 4281), et celle du « suivant » Ouahka-herib (S. 4280), mentionnées plus haut (p. 17-18, Figs. 29-30), illustrent bien cette pratique, puisque leurs proscynèmes s’adressent à d’anciens gouverneurs, désignés comme des divinités58 :

4281 : ḥtp dꞽ n(ꞽ)-swt ḥꜣty-ꜥ Ꞽbw dꞽ.f (…)

Une offrande que le roi donne au gouverneur Ibou, de sorte qu’il donne (…)

4280 : ḥtp dꞽ n(ꞽ)-swt Ptḥ-skr ḥꜣty-ꜥ Wꜣḥ-kꜣ šmsw Wꜣḥ-kꜣ-ḥr-ꞽb mꜣꜥ ḫrw (…)

Une offrande que le roi donne à Ptah-Sokar-Osiris et au gouverneur Ouahka, pour le « suivant » Ouahka-herib, justifié (…)

Loin de constituer une exception, le site de Qaou el-Kebir est donc une bonne illustration de la situation dans les provinces, lors de la transition entre le « Moyen Moyen Empire » et le « Moyen Empire tardif », au cours des règnes de Sésostris II et III, avec un arrêt relativement soudain de la construction de grands complexes funéraires pour les gouverneurs de province, que les raisons en aient été politiques ou économiques, ou qu’elles traduisent un changement dans l’idéologie du pouvoir et des pratiques cultuelles. C’est justement l’époque à laquelle l’on observe un développement sans précédent des stèles privées et de statues de petit format, pour lesquels on peut détecter à la fois une production dépendant du pouvoir royal (qui pouvait être itinérante) et le développement d’ateliers locaux. Ces monuments privés étaient installés soit dans les nombreuses petites chapelles en briques crues dans les nécropoles, soit sur des lieux de culte tels que la Terrasse du Grand Dieu à Abydos, soit encore dans des édifices préexistants, complexes funéraires royaux ou privés en quelque sorte réactivés et transformés en sanctuaires dédiés à des rois ou à des dignitaires divinisés59.

C’est ainsi qu’à Qaou el-Kebir, les tombes monumentales de la première moitié de la XIIe dynastie ne furent pas abandonnées : les activités s’y poursuivirent et de nouvelles inhumations y prirent place, soit dans de nouveaux puits funéraires, soit dans d’anciens réoccupés. Tables d’offrandes, stèles et statues continuèrent d’y être installées. Les trois tombes restèrent certainement un point focal non seulement dans le paysage, dominant la ville et sa région du haut de leur falaise, mais probablement aussi dans le calendrier religieux, en tant que véritables temples abritant le culte des dieux-saints locaux.

4. La destruction des tombes et des statues

Les trois grands complexes de Qaou el-Kebir ont été retrouvés dans un état de dégradation particulièrement avancé. Les reliefs, les éléments architecturaux et toutes les statues avaient été détruits, suivant un processus très systématique. Les nombreuses grandes statues des propriétaires originaux des trois complexes, Ouahka Ier, Ibou et Ouahka II, ont été retrouvées réduites à l’état de fragments, souvent très petits. Seules deux statues, en calcaire plus dur, celles de Ouahka (III ?) fils de Néferhotep (Turin S. 4265, Fig. 31a-c) et celle du député Nakhti (Le Caire TR 23.3.25.3, Fig. 28) nous sont parvenues en meilleur état, mais toutes deux étaient également lourdement défigurées et celle de Ouahka avait même été brisée en deux au niveau de la taille avant d’être jetée dans un puits. Toutes les statues ont eu le nez fracassé et, dans le cas de Ouahka (III ?) fils de Néferhotep, la barbe avait été non seulement ciblée, mais même littéralement martelée et entièrement retirée60.

Comme dans beaucoup d’autres cas, il est difficile de fournir une date à cette (ou ces) campagne(s) de destruction méthodique. Le contexte archéologique dans lequel les centaines de fragments ont été découverts est perdu et il n’existe aucune documentation sur la céramique qui pouvait se trouver dans les mêmes couches stratigraphiques et les dater.

Faut-il émettre l’hypothèse d’un épisode de destruction violente visant à éradiquer la mémoire des nomarques de Qaou el-Kebir et de leurs rejetons, ou à compromettre leur survie dans l’au-delà61 ? On sait peu de choses sur les événements qui se sont déroulés au cours de la XIIIe dynastie, surtout dans les provinces. Il est possible qu’il y ait eu des troubles et des rivalités entre les grandes familles à la tête du pays, ce qui pourrait expliquer la succession rapide des rois à cette époque ; cependant, nous ne possédons pas d’arguments solides en faveur d’une 22 damnatio memoriae. Il est vrai que, comme nous l’avons souligné plus haut, ces dignitaires provinciaux, comme de véritables princes en leur région, se faisaient représenter de manière presque royale, avec de grandes statues dotées d’attributs particuliers (le collier aux têtes de faucon, le pagne shendjyt, la barbe exceptionnellement longue), mais il ne faut pas nécessairement y voir un signe d’usurpation du pouvoir du souverain, peut-être plutôt un signe de la majesté royale dont jouissait le délégué du roi.

Les statues de Ouahka (III) et du député Nakhti montrent que les complexes funéraires étaient encore debout et fréquentés au cours de la XIIIe dynastie, c’est-à-dire bien après les changements qui ont eu lieu sous Sésostris II et III. Par ailleurs, aucun des noms préservés sur les fragments mis au jour à Qaou el-Kebir ne présente de traces de martelage. Si la destruction des monuments et des statues des gouverneurs semble bien avoir été une entreprise minutieuse et de grande envergure, rien n’indique qu’elle visait les individus eux-mêmes. La nécropole a été réoccupée à grande échelle au cours du Ier millénaire avant J.-C. et à l’époque romaine et de nombreuses tombes ont été creusées dans ce qui restait des monuments antiques et de leurs chaussées62. Petrie mentionne même que « [t]his region had in Roman times been made into a crematorium, proving a very strong western influence of settlers here63. »

Ce démantèlement général des anciens monuments doit sans doute être vu davantage comme une réutilisation pragmatique des matériaux, en particulier du calcaire tendre pour les fours à chaux, à une époque où tout souvenir de ces anciens seigneurs était totalement éteint. C’est peut-être dans ce contexte de remploi que les statues ont été rituellement brisées, « désactivées », avant de disparaître dans les fours à chaux ou dans les puits funéraires depuis longtemps pillés.

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